La couleur du Délit : Lettre ouverte à Mr le Conseiller Délégué à La Tranquillité, Prévention et Intégration à Orléans.
Monsieur,
Je viens, par la présente, vous interpeller, quant à l'insécurité permanente que vivent désormais nombre de nos enfants et par
conséquent, leurs parents.
Et cela, non pas du fait de pseudo-bandes organisées ( encore que …) qui seraient à même de les agresser, racketter, harceler ou tout autre acte contrevenant à la loi, mais bien par l'inconduite caractérisée de certains membres de la Police Municipale d'Orléans, dont vous êtes en tout premier lieu, le responsable.
Comportement couvert, une impunité dont ils se targuent sans vergogne devant les jeunes leur répondant qu'ils ne risquent rien.
Notez cependant que j'utilise ici le mot « certains », ne voulant pas jeter l'opprobre ou le discrédit sur tous les employés en fonction au sein de cette police municipale, mais tout de même.
Ainsi mes deux plus jeunes filles – 15 et 13 ans – ont été victimes d'actes de violence gratuite, absolument odieux et humiliants, à différents degrés, de la part de membres de vos services. Actes pour lesquels je demande une enquête sérieuse et approfondie quant aux agissements de ceux qui, devant en tous points être exemplaires, sont les pires modèles de mépris, d'irrespect, d'agressivité et de brutalité qui soient pour notre jeunesse.
Mais voici donc les deux faits que je dénonce, l'un s'étant produit à la traditionnelle fête foraine installée au Parc des Expositions à Orléans qui avait lieu cette année du 22 mai au 13 juin dernier, l'autre tout simplement devant le collège Jeanne d'Arc, rue des Bons Enfants.
Le nom de cette rue prêterait à sourire, si ce n'était le comportement de personnages adultes – sans doute parents eux-aussi – qui se comportent comme de petits roitelets, l'uniforme de la Police Municipale brandi comme passeport pour l'immunité .
Mais venons-en aux faits .
Le mercredi 02 juin dernier, étant une journée spéciale demi-tarif pour les jeunes gens, voulant fréquenter à moindre frais les manèges et jeux se trouvant au Parc des Expositions, ma fille ainsi que l'une de ses amies avaient donc donné rendez-vous à deux autres jeunes filles et néanmoins camarades de classe, à cet endroit vers 17h30.
A ce propos, je rêve du jour où ces jeunes gens retrouveront l'arme du boycott pour contrer cette machine financière qui les réduit à l'état de consommateurs bêlants tandis qu'elle méprise et rejette les citoyens en devenir qu'ils sont au prétexte qu'ils sont jeunes et supposés délinquants.
Alors quant en plus ils cumulent à ce premier handicap celui d'avoir une couleur de peau suspecte, ou un prénom à consonance étrangère...
Le lieu était déterminé à l'avance et comme ces dernières étaient déjà sur un manège, c'est donc très logiquement que les deux premières ( ma fille et son amie ) ont attendu tranquillement au bas de l'attraction que celle-ci se termine pour les retrouver.
Las, elles avaient bien vu un afflux de « forces de l'ordre », - que je serai tentée ici de nommer de « désordre » au vu de ce qui s'est passé ensuite -, vers un endroit situé à proximité de leur point de rencontre.
Mais toutes occupées à discuter et à attendre leurs amies, ni l'une, ni l'autre n'y ont prêté plus d'attention.
Il faut dire aussi que les rondes, tours et détours de la Police Municipale étant tellement nombreux, que l'on finit malheureusement par s'y résoudre et pire s'y « habituer ».
Ce n'est qu'en fréquentant d'autres villes où la sécurité est tout autant garantie qu'à Orléans mais dans une discrétion de bon aloi, que l'on se rend compte du poids déraisonnable et intrusif à bien des égards dans notre vie de tous les jours de cette politique paranoïaque de la « sécurité » à tout crin.
Une anecdote à ce sujet :
Recevant il y a peu une amie demeurant en Italie, celle-ci m'a aussitôt demandé s'il y avait eu un hold-up dans ma ville pour avoir croiser autant de policiers de la gare jusqu'à mon domicile. Un peu honteuse et dépitée j'ai dû lui expliquer la démarche de mise sous surveillance perpétuelle des citoyen-ne-s orléanais-es, qui fait de nous des délinquants en puissance.
Sans doute l'air local qui nous conférerait des vertus ou plutôt des tares quasi génétiques, rejoignant en cela certaines convictions
de personnages voulant nous faire accroire qu'il y a des gênes de la violence qu'il conviendrait de détecter dès l'âge de trois ans .
Cette forme de psychose qui finit par devenir collective, va virer si on n'y prend pas garde à l'affrontement entre générations, adultes contre jeunes gens.
Je n'ose penser à ce que pourrait être les consignes quant aux jeunes, je crains que même sans le savoir, certains se font déjà
chaque jour les « deux minutes de la Haine » en vigueur dans le roman d'Orwell, : « 1984 », les ennemis d'aujourd'hui étant tous les adolescents et jeunes de cette cité :
bronzés, crépus, lippus et autres, typologie exotique en ligne de mire.
A défaut ceux qui présentent un physique de meilleur aloi, si les précédents cités manquent à leurs traques et battues, prendront le relais.
Ces jeunes étant réputés être des forcenés sans foi ni loi qu'il convient de « dresser ».
Voire d'éradiquer leur présence en tous lieux de notre société, en les obligeant à rester confinés chez eux.
Ceux qui n'obtempéreraient pas, d'une façon ou d'une autre à cette volonté étant estampillés et encartés en nombre de fichiers comme probables fauteurs de troubles, et déclarés coupables de fautes non encore commises.
Lorsque l'on regarde les comportements de certains adultes et représentants normalement de la loi, fussent-ils de la Police Municipale, de grandes suspicions et doutes demeurent sur leurs capacités à exercer ce métier.
Métier que ne devraient exercer que des personnels formés, psychologiquement stables et de toute évidence dont on devrait éloigner celles et ceux pour qui l'uniforme sert d'alibi à tous les débordements et dérapages de leurs comportements dévoyés.
Mais revenons aux faits.
Forces de police en nombre, et encore plus grand nombre en quelques instants : Police nationale, Police Municipale, BAC, URAIC...
C'est ce que j'ai appris lorsque j'ai rencontré Monsieur D..., responsable de la direction de la police municipale à Orléans.
On peut ainsi penser que compte tenu de la présence de toutes ces forces d'intervention, il devait y avoir une affaire particulièrement délicate, genre justement hold-up et que la sécurité de tous nos jeunes étaient en danger.
Là où je commence à tiquer, c'est d'apprendre qu'une bonne cinquantaine de jeunes ont été expulsés de la fête foraine, suite à une bagarre semblerait-il de jeunes filles, en son début .
« Une dizaine d'africaines virulentes » selon le rapport faisant suite à l'intervention.
Mais ma surprise n'en reste pas là, car m'est confirmée qu'aucun-e jeune n'a été contrôlé-e, qu'aucune identité n'a été relevée, qu'aucun d'entre eux n'a été conduit au poste de police et qu'aucun parent n'a été prévenu.
Pour le moins, les forces citées plus haut semblent bien disproportionnées pour en arriver à ce résultat final. Par ailleurs, résonne
désagréablement en mes oreilles cette phrase « une dizaine d'africaines virulentes ».
Car sans identité vérifiée, comment peut-on dire d'où étaient originaires ces jeunes filles ? A leurs seules couleurs de peau ?
Mais je poursuis.
Ma fille et son amie, sont finalement alertées par des cris venant de la proximité des auto-tamponneuses. Pas le temps de se poser des questions, les cris sont suivis d'une cavalcade où nombre de jeunes sont repoussés par les forces de police, notamment la police municipale et c'est là que j'exprime ma première indignation .
Tous les jeunes gens – pas de sexisme dans la xénophobie ordinaire - au teint foncé, basané fleurant un exotisme du plus mauvais goût sans doute ? - , se retrouvent bousculés, repoussés avec une violence inouïe à l'entrée de la fête.
Ma fille et son amie ( l'une est métisse, l'autre noire, « négresses » au vu du comportement des deux personnages suivants ) sont de celles et ceux-là.
A proximité, ne comprenant rien à ce qui se « jouait »là, elles tentent tout naturellement de demander des explications aux deux hommes, qui les reconduisent manu militari hors ces lieux.
Et le terme « manu militari » n'est pas trop fort.
Les deux gamines stupéfaites se retrouvent insultées. Ma fille qui tire son amie par la main pour se mettre à l'abri se retrouve avec
une clé de bras et des coups dans le dos, de ce qu'elle pensait être une matraque .
Plus tard, lui demandant de me décrire « l'objet du délit », je me rends compte que finalement cela correspond à ce que Monsieur D..., m'a présenté, soit un tonfa, aussi appelé bâton de défense, mais en aucun cas arme d'attaque.
Au moins, ne pourra-t-on lui reprocher d'être une experte en armes de toutes sortes .
Son amie, quant à elle s'entend insulter de « grosse vache, salope », par le second incriminé dans cette affaire et s'est vu intimer l'ordre de « fermer sa gueule » alors qu'elle protestait du traitement qui leur était fait.
Les autres jeunes filles qu'elles attendaient n'ont pas eu plus de chance, l'une ayant même été violemment giflée par l'un de vos employés, d'autres s'étant pris coups et gaz lacrymogènes.
Mais que je vous parle des deux individus repérés comme faisant partie de vos services et de comportements inacceptables dans leurs fonctions.
Celui qui a commis des violences physiques a justement un physique particulier et reconnaissable : grand, plutôt maigre, des yeux clairs, voire verts, cheveux châtains et détail que tous les jeunes ont noté : il louche.
Ce qui pour le moins donne à penser qu'il se sent particulièrement protégé pour ne pas tenir compte même de ce détail à nul autre pareil.
Individu que j'ai décrit à Monsieur D..., lorsqu'il m'a reçue dès le lendemain de cette affaire, et qu'il m'a affirmé ne pas faire partie de vos services.
Cependant, dès le samedi suivant, ma fille et son amie devant se rendre rue des Carmes dans l'après-midi, l'ont formellement reconnu et ont noté son appartenance à la police municipale.
Voilà pour le premier.
Le second que j'ai au départ, bien trop rapidement « blanchi » de tous comportements violents auprès de Monsieur D..., n'en est pas exempt.
De violences verbales « seulement », cette fois-ci.
Ma fille n'ayant pu m'accompagner ce jour-là, - elle souffrait de son dos et a du être sous antalgique pendant trois jours, on ne se demandera pas pourquoi -, n'a pu reprendre mon propos et s'inscrire en faux quant à ce que j'avais mal compris.
Le second individu donc, a été celui qui a copieusement insulté les unes et les autres.
D'un vocabulaire parfait pour un représentant de la police municipale, un langage châtié qui curieusement s'il est utilisé par les jeunes à leur encontre, les conduise à écoper d'un outrage et insulte à agent dans l'exercice de ses fonctions.
Y aurait-il ainsi une loi pour les forces de l'ordre et un déni de loi pour les autres, les jeunes notamment ?
Autre détail « amusant », cet individu est tout aussi reconnaissable que le premier.
Petit, l'air débonnaire – ne jamais se fier aux apparences, c'est que je dis à mes filles et leurs amies - yeux sombres, chauve et même coquetterie dans les yeux.
Les termes élégants sont ceux que je vous ai cités plus haut, pour ceux qui ont été le plus souvent utilisés.
Dans la bouche d'agent censé représenter l'ordre, c'est tout à fait gracieux et raffiné...
Pour en finir avec ce jour, nombre de jeunes m'ont rapporté également l'attitude d'une femme, sans doute maitre-chien qui menaçait justement de lâcher le sien contre des jeunes filles qui comme ma fille et son amie demandaient pourquoi elles étaient ainsi bousculées et maltraitées.
Et tout cela à l'heure – 18h - à laquelle je préparais avec Carole Tresca réalisatrice de film, Christine P. du MFPF, Anne B. de la LDH et de Monique L. de Mix-Cité, mon intervention le soir même au Café des Droits de l'Homme contre les violences faites aux Femmes.
Qu'à la même heure ma fille était victime de violence gratuite de la part de membres de votre service est tout de même un paradoxe pour le moins révoltant.
Ceux qui sont censés protéger sont ici des agresseurs, exerçant en toute impunité, et ils s'en sont vantés !
Réaction immédiate de ma part puisque dès le lendemain matin j'étais dans vos services et rencontrais Monsieur D..., qui a fini par me demander de vous contacter par courrier.
Entre temps, deuxième événement se produisant devant le collège Jeanne d'Arc et tout aussi révoltant.
Comme vous le savez sans doute, cette année, les entrée et sortie des élèves fréquentant cet établissement ont changé de côté. Si les années précédentes elles s'effectuaient rue Dupanloup, elles se font désormais, suite aux travaux de rénovation et d'agrandissement du collège, rue des Bons-Enfants.
Et bien entendu cela renâcle fort du côté du voisinage qui ne supporte pas les rires et conversations des enfants, que ce soit avant l'entrée des cours ou à leur sortie.
Et comme d'habitude, dans cette ville où les adultes ne jouent plus leur rôle, et préfèrent se décharger lâchement de leurs responsabilités, ils appellent, vivement encouragés en cela par les consignes de vos services, la police municipale.
Je vous passe sur les menaces et autres intimidations que ces adultes exercent à l'encontre des enfants – au collège, ils ont entre 11 et 15 ans - , les sommant au mieux de dégager, les traitant d'idiots et d'idiotes, relevant leur prénom pour ensuite les communiquer à vos services, leur sortant l'article « tant » du code « tant » sur le trouble de voisinage, à en rire si ce n'était en fait, à pleurer, de constater de tel comportement immature de la part de ces derniers.
Une bonne part de délation déguisée aussi, mais en ont-ils même conscience puisqu'on les dé-responsabilise eux-aussi.
Pas un qui ne viendrait discuter avec ces jeunes, bien au contraire entre insultes et menaces, la détestable mayonnaise de l'intolérance monte aussitôt.
Je crois qu'il va falloir que l'on se pose dans notre pays, la question de la relation que l'on a avec nos jeunes .
Une société qui se comporte ainsi à leur égard est une société qui va mal et ce n'est pas la mise en place d'une politique sécuritaire univoque, faisant de tout citoyen un délinquant potentiel, qu'on en vient à installer des caméras plutôt que de mettre de l'humain dans les rapports entre adultes et adolescents-enfants, que l'on arme à qui mieux-mieux diverses polices de n'importe quel gadget délétère ( flash-ball, taser), que l'on met en place des tranchées sous les ponts pour éviter que des SDF ne puissent s'y abriter que l'on résoudra ce problème.
Donc ce vendredi, ma fille attendait à la sortie de ses cours deux amies d'une autre classe, à la sortie de l'établissement bien évidemment.
D'autres jeunes gens attendaient aussi en discutant et riant.
Dois-je vous faire un cours de simple anatomie pour vous dire que les garçons à l'adolescence changent de voix, qu'ils muent, et par conséquent qu'elle résonne fort (leur voix) dans un registre de sons graves.
Encore une fois, dans cette rue des Bons-Enfants où l'on n'a pas appris aux voisins et néanmoins parents à se comporter en adultes, la police municipale a été appelée en renfort, pour mettre bon ordre à trouble du voisinage.
Ma fille a donc été témoin de la façon dont certains agents se comportés vis à vis d'eux.
Je vous passe le même langage grossier et irrespectueux décrit plus haut, à l'égard des enfants présents, la tentative d'explications des jeunes qui a fini par une altercation physique puisque l'un de vos agents s'est cru obliger de coller un jeune au mur !
Comme exemple, je crois qu'il y a mieux.
En tout état de cause, ma fille est revenue très choquée du collège.
Et je le suis tout autant qu'elle.
Aussi je vous demande une enquête sérieuse et approfondie quant à ces comportements inacceptables de la part de vos agents.
Pour le moins, une police est faite pour rassurer et non inquiéter.
Ce qui pour ma part n'est pas le cas.
Mes filles portent pour vos agents une tare rédhibitoire, elles sont métisses et cataloguées.
Je vous demande, Monsieur, de bien vouloir faire le nécessaire afin que cela ne se reproduise pas, et que les agents incriminés soient écartés des fonctions d'intervention.
Veuillez agréer, mes sincères salutations.
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