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19 Oct

Syrena de Ligera, Sirène de Loire…

Publié par Circé  - Catégories :  #fable, #Ecriture, #Chroniques Circéennes, #Nouvelle

Les sirènes ne sont décidément plus ce qu’elles étaient.

A moins finalement que pendant des siècles l’on nous ait conté fariboles, calembredaines ou autres billevesées.

Mais laissez-moi vous narrer cette fable des temps modernes.

 

Alors que je flânais récemment sur les berges de notre belle alanguie, cette Loire, qui au sortir d’un bel été se découvre souvent plus que de raison, je fus attirée par un étonnant quoique fort peu mélodieux chant. Chant en provenance justement, de l’un de ces bosquets devenus pour si peu de temps accessibles.

 

Curiosité piquée au vif, je repoussais ainsi les branches des arbustes qui me séparaient du lieu d’où provenait ce qui devenait cacophonie. J’y découvris cet étrange spectacle. Je n’en croyais pas mes yeux …

 

Indubitablement, une sirène, cet être mythique, mi-femme, mi-poisson reposait nonchalamment dans une piscine en plastique pour enfants, aux boudins multicolores de rigueur. Elle s’ombrageait d’un cocasse parasol à franges, avec à proximité une chaise de bistrot amarante lui servant de desserte. Au centre de celle-ci, trônait une vasque emplie de sucreries diverses et variées. Et elle les dégustait en chantonnant, tout en se contemplant dans un miroir à mains.

 

Sentant ma présence, elle se redressa vivement et m’accueillit avec quelques mots d’excuses, avant de se lancer dans un long monologue, n’oubliant pas cependant et par instant de me prendre à témoin.

 

« Ah, flûte...Je ne m’attendais pas à recevoir de la visite, là.

Mais c’est que vous me surprenez au saut du fleuve. Normalement, à cette heure-ci, c’est pour moi le temps de prendre un peu de repos, de quiétude. Une sieste bien méritée, quand le jour succède à la nuit, avant que de nouveau, il ne s’efface pour laisser place à l’ombreuse obscurité.

C'est que, je vis la nuit, moi...

 

Mais, vous semblez surpris ? C'est parce que je mange des bonbons ? C’est ça ?

 

D’un ton doux et interrogateur, elle poursuit :

 

Mais vous faites quoi, vous, lorsque le monde autour de vous, vous semble triste et gris ? Et cela malgré les rayons envoûtant de l’astre solaire, qui jouent à saute lumière parfois à la cime des arbres, ou bien que la brise taquine s’ébroue dans votre chevelure en ondulations soyeuses et câlines ?

 

Oui...Vous faites quoi, vous ? Lorsque vous avez envie d’un peu de douceur, de tendresse, de suavité, tout ce qui peut éveiller votre cœur et le faire chanter ?

 

Et bien moi, moi, je prends un bonbon !

J’enchante alors mes papilles en le posant négligemment sur le bout de ma langue, puis je le laisse fondre délicatement en ma bouche, sous son palais pour en extirper le divin élixir, que je laisse ensuite s’écouler goutte à goutte au creux de ma gorge, avant que de l’avaler doucettement, pour qu’il finisse en explosion de saveurs au plus profond de ...mon gosier ! Se faire plaisir, faire pétiller l’instant, la minute douloureuse, avec juste un bonbon ...

 

S’emportant soudain :

 

Mais trop souvent c’est fébrilement que je jette un bonbon, puis un autre dans ma bouche, une fraise, un chamallow qu’importe, et alors rageusement je les écrabouille entre mes dents, les déchiquettent, les étrillent et les pulvérisent... Je me transforme en sirène hamster : je les fais passer de ma joue gauche à ma joue droite, puis de ma joue droite à ma joue gauche et je finis par les engloutir fiévreusement, avant que dans la foulée, je n’en atomise d’autres furieusement ...

 

Poursuivant un rien agacée, avant que de s’apaiser pour mieux faire droit à sa contrariété :

 

Oui, je sais, il faut que je fasse attention à ma ligne !

Mais non, mais non, surtout ne vous méprenez pas, je fais toujours super gaffe d’habitude, vous pensez, je mange toujours très équilibré : de la salade, des algues, du poisson et même des moules de Loire...

Bien obligée d’ailleurs sinon ma queue me boudinerait…

 

Et joignant le geste à la parole elle la redresse pour mieux me montrer l’objet de son inquiétude, tout en s’esclaffant, avant que de continuer à disserter gaiement :

 

Ah...C’'est elle qui vous stupéfie ? Mais sapristi, j'y suis, c'est cela, qui vous ahurit ainsi ?

 

Oui, je sais, il m'arrive aussi de parler en rimes

Une autre de nos particularités à nous les sirènes, même en bords de Loire…

Et oui, je suis une Sirène de Loire

 

Mais je parle, je parle et je manque à tous mes devoirs.

Je ne me suis pas présentée : je m’appelle Syrena de Ligera.

Ah ? Cela sonne grec ? Vous avez en effet raison, j’ai bien quelques origines...

 

Mais perso, je n’assume pas ma particule. Cela fait un peu trop olympien à mon goût, jupitérien dirait-on aujourd’hui, alors je me fais appeler Emmanuelle, Manue pour les intimes...

Pour vous aussi hein, bien sûr, vous pouvez hein...

 

Mon regard affichant sans doute et derechef surprise et étonnement, elle poursuit un tantinet vexée :

 

Et bien quoi ? J’ai l’impression que vous n’en revenez pas ?

 

Pfff... C’est toujours la même chose, hein...

Tout le monde connaît mes copines, Loreleï, des bords du Rhin ou la Petite Sirène de Copenhague, mais Syrena-Manue des bords de Loire, hein, bernique écrevisse !

 

Et pourtant, si je vous disais le nombre de mariniers, conteurs et autre bonimenteur qui prétendent me voir tous les soirs sur les bords de Loire...

Et vas-y que j’aurais une belle voix, que je serai une sorte de Dame Blanche n’attendant qu’eux, pour me réchauffer entre leurs bras vigoureux, esseulée, nue et offerte au clair de lune...

 

Non mais vous y croyez-vous ? Même pas un pour se demander si après tout, je ne préfère pas les femmes hein, mais oui, qui vous dit que les Sirènes de Loire sont hétérosexuelles hein ? ou bien...ou bien même bi... ? rajouta-t-elle d’un air gourmand en poursuivant :

 

Mais non, c’est toujours la même chose,hein, et toujours le même fantasme éculé de la femme à queue n’attendant qu’eux...Et les voilà, ces traineux d’grève et autres naufragés à nous traiter de sorcière ou d’enchanteresse selon l’accueil, ou non d’ailleurs, qu’on leur aura réservé...Et ils m’épuisent, mais ils m’épuisent...Des siècles que cela dure !

 

Dire que j’ai autrefois fui Jules César pour les mêmes comportements.

Bon lui, c’était au sortir de sa douche que je devais me méfier. Si j’avais le malheur de passer à proximité, il laissait alors tomber sa toge et sans autre forme de procès me faisait de bien mauvaises façons !

 

Un véritable satyre, oui, oui, je vous le dis !

 

Mais vous semblez encore toute étonnée … ???

Je sais, je sais, je ne fais pas mon âge, mais quand même …

Ah non, ce n’est pas cela ? Vous ne saviez pas que Jules César avait eu une Sirène pour Maîtresse ?

 

Oh, mais c’est tout à fait normal, c’est que, je n’en étais pas encore une à l’époque. Il faut que je vous raconte la suite. J’ai vraiment fini par en avoir marre du faune déguisé en général romain, alors je me suis enfuie, direction : la Gaule !

 

Mais allez savoir pourquoi, il faut croire que je les collectionne hein, parce que là, j’y ai rencontré un grand gaillard, un grand blond moustachu et à grosses nattes : un certain Vercingo, Vercijo, Vergorix ?

Oh et puis zut hein peu importe son nom et comme dit l’autre, hein, peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse...

Enfin quand je dis flacon, quelle désillusion...

 

Lui, il n’en voulait qu’à... mes pieds, mes petons, mes ripatons quoi  !

 

Et vas-y qu’il me les triturait, massait, léchouillait, cajolait, bécotait...Et pendant que je me languissais, lui, l’obsédé du pied, ahanait...

 

Vous savez que j’avais interdiction de marcher ?

Je ne pouvais même plus me promener, déambuler, baguenauder, et encore moins danser...Il ne voulait prendre que MON pied !

 

Alors de nouveau, je suis partie...

Mais lui, il m’a poursuivie ! Il ne pouvait plus se passer de cette curieuse fantaisie...

 

Allez donc savoir pourquoi, moi, pour lui échapper, j’ai eu celle incongrue, de me jeter dans le fleuve Liger ? Fatalitas ! J’avais juste oublié que c’était une mâle divinité.

 

Et dès le premier instant, tout a recommencé !

 

Pour me faire parait-il agréable réception, à peine avais-je plongé en ses eaux, qu’instantanément il a collé ses algues à ma peau, envoyé ses délurés tritons caresser mes tétons, d’effrontées écrevisses inspecter mes cuisses, et m’entraînant fougueusement dans les tourbillons échevelés de son flot tempétueux, il me fit tourner sur le dos au bord de l’eau, sur le ventre au mitan de son antre, mais quand il a voulu que d’audacieux silures glissent et s’immiscent jusqu’à mon calice, alors là, j’ai dit Non ! Stop !

 

Oups, mais pardon peut-être avez-vous chastes oreilles ?

 

Bon, bon, il vous suffit finalement de savoir que si vous avez devant vous, là, maintenant, une sirène de Loire, c’est que j’ai décidé en cet instant éprouvant, que pour nager sans me faire explorer, je deviendrai une femme à queue !

 

Oh non, arrêtez d’être surprise là…

Il y a bien des femmes de tête, pourquoi ne serai-je pas une femme à queue hein ? La preuve !

 

Pour autant, les bords du fleuve Liger, celui que vous appelez aujourd’hui  Loire, ce n’est pas une sinécure, hein, non, non, non...

Comme pour toutes mes copines qu’elles soient des bords du Rhin, de Copenhague, ou d’ailleurs, car nous sommes nombreuses, je vous le confirme...

 

Il s’y en passe des choses, ici, en plus de ce que je vous ai déjà dit, et pas toujours des biens propres...

 

Tiens par exemple, tous ces malappris qui, pris d’une envie pressante, se déboutonnent allègrement la braguette, afin de soulager avec une certaine délectation, j’en conviens, mais une assurée goujaterie aussi, leur satanée vessie. Et ils prétendent, en rigolant, les mufles faire des ronds dans l’eau.

 

Savent-ils qu’en réalité ils lansquinent ces pignoufs sur l’une de mes sœurs ou bien moi ?

 

Ah, c’est sûr qu’il en prend un coup hein le mythe de la Sirène à la chevelure voluptueuse tiens ! Essayez donc de l’entretenir, vous, à coups de jets de l’urine malodorante de ces malotrus, tiens ! Et l’odeur, mais l’odeur, soyez donc étonnée vous, après que l’on vienne nous décrire parfois, nous les sirènes, comme des créatures immondes ayant du varech au sommet de notre tête.

 

Ben maintenant vous savez pourquoi ! Il y a de quoi être en colère, non ?

 

Elle s’arrête, parait fatiguée, fait silence.

Puis prend congé en ces termes :

 

Un jour, si j’ai un peu plus de temps, je vous conterai comment certains s’approvisionnent en boue pour parait-il prendre soin de leur peau...

Là mes copines et moi, nous tenons notre petite vengeance, mais vraiment, ce sera pour une autre fois...Car il se fait tard je crois, et j’ai besoin d’un peu de repos...

 

Il me faut prendre quelque répit, me ressourcer en cet endroit, où je puisse dormir sans me faire lutiner ou encore « arroser » …

 

Et elle s’allonge dans le bassin de plastique, avant de se redresser vivement pour terminer par ces mots :

 

Ah mais j’ai oublié, si vous voulez connaître la suite, prenons RDV, nous pourrons bavarder et faire connaissance plus amplement...

 

Je vous raconterai toutes les autres aventures et résistances des sirènes de Loire, les aléas (non pas jacta est, cela me rappelle l’autre là!) de la vie qu’elles subissent mais aussi surmontent, alors si vous avez besoin de conseils, d’échanger, de bavarder, n’hésitez pas, vous pouvez me contacter.

Et oui, je suis connectée ! Sirène, oui, mais geek, comme ils disent chez vous.

 

Vous avez de quoi noter ? Alors mon site, c’est :

- Manue-Loire.Q... mais non pas Q pour cul, tout en montrant son postérieur, vous êtes coquine, taquine là, mais Q pour QUEUE !

 

Et elle baille bruyamment, avant de sombrer aussitôt dans les bras de Morphée…

Syrena de Ligera, Sirène de Loire…
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