Mon intervention lors du Colloque sur les violences faites aux femmes, en présence de Mme Najat Vallaud Belkacem.
Le Ministère des Droits des Femmes a organisé ces lundi 2 et mardi 3 septembre 2013, à l'Académie Nationale de médecine de Paris et en présence de Mme Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits des Femmes et Porte-parole du gouvernement un colloque sur le thème des violences faites aux femmes.
Tandis que le premier jour était consacré aux victimes, le second faisait place, lui à la prise en charge des auteurs.
Bien entendu, j'y participais, tout en rongeant mon frein. Non pas que les interventions n'étaient pas de qualité, bien au contraire. Mais l'exercice était bien trop court, et ressemblait surtout à une présentation d'actions mises en place dans quelques départements, par trop minoritaires pour être vraiment représentatives de ce qui se passe en réalité sur le terrain.
Je bouillonnais intérieurement. Et n'ai pu me taire !
C'est ainsi que je fus la dernière intervenante tant de la journée que de la salle. Et que j'ai interpellé Mme la Ministre des Droits des Femmes par l'intermédiaire d'une ou plutôt des questions.
Voici la teneur de ce qu'un des participantEs, venu à ma rencontre ensuite, m'a dit être un véritable plaidoyer tant pour la cause des femmes que des associations qui œuvrent sur le terrain.
A vous de vous en faire une idée.
" Depuis deux jours, Mme La Ministre, nous parlons de femme victime, de femme patiente ou malade en ce qui concerne la santé, de plaignante ou témoin en ce qui concerne la justice, mais en fait, une femme n'est-elle pas une citoyenne comme les autres, à part entière et qui a le droit d'être protégée comme tout autre citoyen ?
Car avant tout, et si sans conteste les femmes sont malades de la violence de leurs agresseurs, elles sont surtout malades de la violence de notre société où sévit la domination masculine.
Car oui, il s'agit bien de domination masculine et merci à Michèle Berthier et Jean-Yves Jalain d'avoir enfin prononcé ces mots et de l'avoir dénoncée, cette domination.
Alors, désolée de jouer ici la trublionne, mais nous avons assisté durant deux jours à une sorte d'inventaire à la Prévert d'actions qui se faisaient et qui marchent effectivement, mais là où il y a encore des moyens humains et financiers.
Cependant, la réalité sur le terrain est toute autre !
Sur le terrain, c'est :
- la mise en concurrence financière des associations qui œuvrent contre les violences faites aux femmes,
- la fin de la présence des travailleurs sociaux dans les gendarmeries et commissariats de police au prétexte d'économie,
- le manque criant de magistrats dans les tribunaux : 2 JAF en 2012 à Orléans au lieu des 6 qui devraient siéger. Comment s'étonner en ce cas qu'il n'y ait eu que deux ordonnances de protection prises cette même année ?
- la baisse des subventions des associations, et même à la faveur du changement des services de tutelles qui abondent ces subventions, tout simplement leur suppression. Ce qui a été le cas à Orléans dernièrement. Alors que le Planning Familial avait mis en place dans un quartier sensible de la ville, des interventions auprès de jeunes garçons pour une éducation à l'égalité entre garçons et filles depuis plusieurs années, ce sont pas moins de 20 000 euros qui n'ont pas été renouvelés et tout cela pour quoi ? Pour mettre à la place des caméras de surveillance !
Pas sure que cela fasse avancer la cause !
Et que dire du manque criant de places d'hébergement pour les femmes victimes de violence ? 10 places dans notre département, alors qu'il y a eu plus de 200 demandes en 2012 ?
Par ailleurs, nous avons parlé de violences morales, de violences physiques, mais complètement éludé la problématique des violences financières.
Car que dire de la situation des femmes qui s'étant extirpé du cercle infernal de la violence subie, ont eu la chance de trouver une place en centre d'hébergement, et qui lorsque le moment est venu pour elles d'avoir enfin un appartement, se retrouvent confrontées aux dettes, loyer ou autres que leur a laissé leur compagnon ?
Je siège, Mme la Ministre, en commission d'attribution des logements d'un organisme HLM. Les demandes de logement pour des femmes victimes de violence ont explosé. Il faut absolument que la loi change, que les femmes mariées ou non et qui sont victimes de violences puissent se désolidariser du bail mais aussi de tout crédit dès leurs départ et séparation d'avec leur compagnon, et bien avant qu'un divorce ne soit prononcé.
Il y en a assez qu'elles subissent la double, la triple peine et qu'elles soient rejetées ainsi de notre société.
Sommes-nous réellement des citoyennes à part entière ou bien des handicapées sous-citoyennes parce que simplement femmes ? Il semblerait bien que la réponse soit malheureusement oui, nous sommes des handicapées .
Et quand au handicap d'être femme, on rajoute celui d'être femme handicapée (physique, mentale), femme immigrée, femme sans papier, femme SDF, car oui il y a des femmes SDF et elles sont agressées physiquement, sexuellement dans les 8 jours qui suivent leur mise à la rue, femme prostituée qu'en dire ?
Alors Mme La Ministre, puisque c'est à vous que va s'adresser ma question : Au delà de la simple volonté politique affichée, des bonnes volontés des unEs et des autres ici présentEs, quand est-ce que nous aurons enfin et véritablement les moyens humains et financiers pour vaincre ce fléau qu'est la domination masculine et de ses conséquences que sont les violences faites aux femmes ? Merci. "
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