Quand ne pas avorter tue...
Comment peut-on mourir de tant d'obscurantisme, aujourd'hui encore et...en Europe, à une petite heure d'avion de Paris ?
Elle s'appelait Savita, était âgée de 31 ans et exerçait la profession de dentiste en Irlande. Savita était aussi enceinte, de 17
semaines exactement.
Fin octobre, prise de violents maux de ventre, elle s'est présentée en urgence à l'hôpital de Galway. Des saignements importants sont apparus. Savita était en train de faire une fausse couche.
Au prétexte d'une loi obscurantiste, guidée par de seuls préceptes religieux, les médecins ont refusé d'intervenir et de faire le nécessaire curetage dont elle avait besoin. Le coeur du bébé battait encore...
La fausse couche se ferait "naturellement", et ils n'interviendraient pas.
Pendant trois jours, Savita a attendu et agonisé, pour finir par mourir d'un empoisonnement du sang, autrement dit d'une septicémie. Son mari a eu beau prié, intercédé, demandé que l'on s'occupe de sa femme, de crier qu'il n'était pas catholique, ni irlandais, rien n'y a fait : Savita est morte.
La polémique enfle en Irlande.
Une enquête a été diligentée. Mais en ce pays, les forces réactionnaires et arriérées d'un catholicisme meurtrier sont encore à l'oeuvre.
L'Irlande est ce pays où tant de crimes pédophiles ont été commis par les mêmes tenants de cette religion. De même pour de graves et habituelles maltraitances pouvant conduire à la mort, à l'encontre de femmes dites "perdues".: filles mères, mères célibataires tenues à l'écart de la société, à l'isolement dans ces "camps" de rééducation, pudiquemment nommés "couvents de la Madeleine".
Toujours par les mêmes ...
Aujourd'hui encore, en Irlande, la mort guette les femmes au détour d'une grossesse, désirée ou non .
Et ceci, vingt années après l'affaire "X", cette simple lettre qui désignait le cas de cette jeune fille de 14 ans, qui enceinte à la suite d'un viol, s'était vue interdite de sortie de territoire, de façon à ne pas mettre un terme à sa grossesse, alors que ses parents venaient demander justice en déposant plainte.
Du haut de ses 14 ans, elle a attaqué le gouvernement irlandais, menaçant de se suicider si on ne l'autorisait pas à avorter, pour
finir par faire une fausse couche qui l'a délivrée de ce cauchemar.
Nous en sommes donc encore là en 2012.
Il faut que la loi change en Irlande, comme dans tous les pays de l'UE où les droits des femmes ne sont pas respectés.
Savita est morte, parce qu'étant enceinte, son corps ne lui appartenait plus...
Honte à vous, Messieurs les législateurs ...
Aujourd'hui, 21 novembre 2012 est une journée européenne d'actions suite au décès de Savita en Irlande, l'hôpital de Galway ayant refusé de pratiquer un avortement qui aurait sauvegardé sa vie.
Le Planning Familial, ainsi que 27 autres associations ont adressé ce jour, cette lettre ouverte à l'Ambassadeur d'Irlande en France :
Monsieur l’Ambassadeur,
Nous, organisations de la société civile, vous écrivons pour vous exprimer notre consternation à propos de la mort récente de
Savita Halappanavar, suite au refus de l’hôpital universitaire de Galway de répondre à sa demande d’interruption de sa grossesse.
Cette affaire tragique démontre une fois encore que l'interdiction de l'avortement en Irlande est non seulement une atteinte à l'autonomie des femmes, mais qu’elle conduit à des souffrances inacceptables et même à la mort.
La situation de Savita Halappanavar fournit la preuve la plus évidente que les lois qui n’autorisent l'avortement que pour sauver
la vie d'une femme, telle que la loi irlandaise le prévoit, sont médicalement inefficaces et éthiquement inacceptables. Il existe de nombreuses situations cliniques dans lesquelles un risque
grave pour la santé d'une femme enceinte peut devenir un risque pour sa vie.
Retarder l’adoption de mesures d'urgence ne fait qu'augmenter ce risque. Les médecins devraient au minimum être habilités par la loi à intervenir pour des raisons de risque pour la vie et pour la santé de la femme.
Vous n’êtes pas sans savoir que la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ainsi qu'un certain nombre d'organismes des Droits
Humains des Nations Unies, ont appelé le gouvernement irlandais à mettre sa législation sur l'avortement en conformité avec les normes internationales des droits de l'Homme. Si ces appels avaient
été entendus, le décès de Savita Halappanavar aurait pu être évité.
Avec la mort de Savita Halappanavar, l'Irlande rejoint les rangs des pays du monde où l'avortement est refusé aux femmes et conduit
à leur mort.
Nous demandons instamment à votre gouvernement de prendre des mesures urgentes et décisives pour réformer la législation sur
l’avortement, non seulement pour des raisons de santé publique mais aussi parce que l’avortement est un droit fondamental des femmes à disposer de leur corps.
Nous vous prions de recevoir, Monsieur l’Ambassadeur, l’expression de notre très haute considération.
Liste des organisations signataires :
Association Nationale des Sages-Femmes Orthogénistes (ANSFO) / Adh’Elles - Maison des associations / Association nationale des
études féministes (ANEF) / Association « Si les femmes comptaient » / Citoyennes Maintenant / Collectif des Associations pour le Droit à l’Avortement et la Contraception (CADAC) / Collectif
National des Droits des Femmes (CNDF) / Collectif de Pratiques et de Réflexions Féministes « Ruptures » / Collectif Tenon / Coordination française pour le Lobby Européen des Femmes (CLEF) /
Coordination liégeoise de la Marche Mondiale / Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL) / Commission Droits des femmes/Féminisme du Parti communiste / Femmes Solidaires /
Femmes libres – Radio Libertaire / Fédération des Centres de Planning Familial des Femmes Prévoyantes Socialistes / Le Planning Familial / Lesbiennes of Colors (LOCs) / Maison des Femmes de
Montreuil / Marche Mondiale des Femmes – Section française / Mouvement Jeunes Femmes / Osez le Féminisme ! / Parti de Gauche / Réseau féministe Rupture / Réseau « Encore féministes ! » / SOS
Sexisme / Socialisme et Féminisme
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