04 Février 2008, Versailles : Un Déni de Démocratie.

Hier se tenait à Versailles un congrès extraordinaire pour modifier notre constitution.
Ceci afin de valider, légitimer, légaliser le Traité de Lisbonne ratifié par Nicolas Sarkozy en décembre dernier.

Pour ma part, et je le dis tout net, cela a été une grande trahison du vote référendaire.
Et de l'expression majoritaire au suffrage universel des citoyens français qui en 2005 avec 55 % des voix avaient dit NON au Traité Européen, tel qu'il était présenté.

Le Traité de Lisbonne n'est qu'une copie à peine épurée du premier texte.
Et qu'on ne vienne pas me dire qu'il sera possible de modifier, amender quoique ce soit dans ce texte .
Pourquoi ne pas avoir en ce cas fait le nécessaire avant que de l'accepter en l'état ?

Une abstention est un grand manque de courage.
Il y avait là matière à redonner leurs voix aux citoyens, et rappeller à celui qui avait clamé qu'il était le "Président de tous les Français", que ceux-ci s'étaient déjà exprimés !

Pour le moins, un nouveau référendum aurait été un grand signe de Démocratie, quelqu'en soit le résultat .

Ainsi donc ce que disait Bertold Brecht trouve ici un grand écho :

" Quand le peuple vote mal, il faut changer le peuple " ou

"Puisque le peuple vote contre le gouvernement, il faut dissoudre le peuple ".

Quelques photos faites hier .
Des élus, des personnalités qui ne se sont pas trahis et de simples citoyens, anonymes .

 

















Dans la foule des anonymes, deux photos prises à des moments différents :

Ce vieux monsieur, qui marchait péniblement avec une canne et à qui je demandais de faire attention à une nouvelle possible bousculade. 
Peu de temps auparavant, une grenade lacrymogène lancée par les CRS jugeant sans doute la foule trop insistante pour demander passage, avait crée un brusque repli vers l’arrière.

Avec un sourire, il m'a répondu qu’il allait avoir 81 ans le 11 février prochain et qu’il pouvait donc bien mourir, tout en me posant cette question :

"- Mais c’est bien un Déni de démocratie n’est-ce pas ce qui se passe à cet instant dans le chateau devant nous ?
- Oui, vous avez raison .
- Alors ce n’est pas à mon âge que je vais me taire " 
Et il m'a dépassé, chancelant tout en criant : " Nous voulons un référendum..."

                                                              

Et puis celle-ci prise en toute fin de manifestation .

Un homme arrivait, brandissant un drapeau français en berne .
Comme je lui indiquais que le rassemblement était pratiquement terminé, il m'a répondu :

-" Voyez-vous, je ne participe que rarement à une manifestation.

Je ne suis pas un gauchiste et encore moins un membre d'extrême droite.

Je ne voulais pas venir, et puis décidément non, je ne pouvais pas me taire, alors me voilà . On m’a confisqué ma voix, je suis en deuil de la Démocratie dans mon propre pays . 

Et pour terminer, celle-ci lourde de symbolique :

Un amoncellement de nuages sombres au dessus du chateau de Versailles .

Avertissement ou rappel historique du lieu ?

Toujours est-il qu'hier, alors qu'à cet endroit est née la République il y a plus de 200 ans, les citoyens que nous sommes ont été censurés et baillonnés !

Comments

[BCT]

Est-il nécessaire de dire que nous sommes tous des européens convaincus. Depuis la dernière guerre et le rideaux de fer nous ne pouvons que la souhaiter.
Mais nous voulons tous une Europe qui protège, une Europe qui régule, qui contrôle et bien d'autres choses qu'il est trop long d'exposer içi.
Ce que j'ai envie de dire c'est qu'il nous manque toujours du temps. Le peuple a besoin de temps. Du temps pour qu'on lui explique et surtout qu'il puisse s'exprimer.
Le verbe "confisquer" est le plus adapté. On nous confisque notre Europe. Pour reprendre ce bon Astier dans Kamelot quand il dit à Perceval "Laissez tomber vous ne pouvez pas comprendre" c'est exactement cela qu'il se passe. Bon c'est vrai Perceval est idiot (c'est pas faux) mais nous ne sommes pas Perceval.
C'est le peuple à nouveau qui devait dire ce qu'il veut. Un référendum aurait suffit pour clarifier les choses. Il y aurait eu débats, discussions, explications.

[Miguel]

Moi qui croyais que les députés n'étaient que les représentants des citoyens... Comment justifier qu'ils puissent casser un vote référendaire ?

[Gregz]

Merci en effet de faire l'écho de cette manifestation.
Le témoignage de ce vieil homme est très fort, que lon soit d'accord ou non avec ce qu'il défend.

En ce qui concerne ma position j'avoue ne pas trop savoir ou me placer. J'étais pour le Oui, cependant le peuple s'est exprimé. Abstention pour moi. :)

[AnaxaG]

Bien plus que censuré et baillonné par les soi-disant représentants du peuple, cette manifestation dont l'appel avait été lancé début janvier, n'a pas eu ou très peu d'échos auprès des médias. Merci donc d'en avoir fait état.
Une nouvelle devrait avoir lieu à l'occasion du vote de jeudi devant (ou derrière ?) l'Ass Nat.
où il semble là qu'il y aura peu d'abstention, car même le PS a décidé de dire OUI en supposant que ce traité ne pourrait qu'être une avancée - sous entendu, le peuple qui a dit non n'a rien compris...
Entendu ce matin Daniel Cohn Bendit sur France Inter indiquant que le référendum au niveau européen aurait plus de sens qu'un référendum national qui risque de n'avoir comme résultat qu'une sanction de la politique nationale. Je suis clairement d'accord avec lui, mais c'est en 2005 qu'il aurait fallu le mettre en place...

J'ai personnellement voté OUI au référendum, puisque le texte avait alors la particularité d'enlever les énormes couches de textes qui préexitaient et ainsi permettait de remettre à plat "l'Europe" en lui permettant de fonctionner mieux et de se protéger mieux dans un contexte de mondialisation ultra libérale.
Le "mini" traité de 2008 va venir s'empiler sur les autres textes existants ce qui va complexifier un peu plus l'Europe...
Mais là n'est évidemment pas la question.

Reste aux Irlandais le pouvoir de dire NON...

Ce qui m'étonne aussi c'est la date de ces votes en France : pourquoi si tôt par rapport aux autres Etats européens ?

[Kamizole]

Véritable déni de démocratie, effectivement. Mais aucunement surprenant sous Sarko (d'autant qu'un certain nombre de socialistes opposés au "non" ne sont pas mécontents de nous enterrer par la même occasion... la plupart étant d'ailleurs sur la longueur d'ondes du libéralisme et de l'Europe actuelle, nullement gênés pas la mondialisation qu'ils parlent seulement de "réguler" mais sans y mettre les moyens nécessaires !)
Sur le plan purement constitutionnel je suis certaine que c'est une illégalité manifeste qui ne respecte nullement la nécessite du "parallélisme des formes" qui s'applique à d'autres actes : il faut une loi pour changer une loi, un décret et non un simple arrêté pour modifier un arrêté, etc...
Dans la mesure où 55 % de la population avait rejeté la Constitution européenne, on ne peut faire passer un texte similaire par la bande sans nous consulter à nouveau par referendum. CQFD ! Déni de démocratie.